Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 1.djvu/124

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Sabine, sort et revient.

J’ai bien eu de la peine à la faire pisser.

Sganarelle

Que cela ? voilà bien de quoi ! Faites-la pisser copieusement, copieusement. Si tous les malades pissent de la sorte, je veux être médecin toute ma vie.

Sabine, sort et revient.

Voilà tout ce qu’on peut avoir ; elle ne peut pas pisser davantage.

Sganarelle

Quoi ? Monsieur Gorgibus, votre fille ne pisse que des gouttes ? voilà une pauvre pisseuse que votre fille ; je vois bien qu’il faudra que je lui ordonne une potion pissatrice. N’y auroit-il pas moyen de voir la malade ?

Sabine

Elle est levée ; si vous voulez, je la ferai venir.


Scène V

Sabine, Gorgibus, Sganarelle, Lucile
Sganarelle

Hé bien ! mademoiselle, vous êtes malade ?

Lucile

Oui, monsieur.

Sganarelle

Tant pis, c’est une marque que vous ne vous portez pas bien. Sentez-vous de grandes douleurs à la tête, aux reins ?

Lucile

Oui, monsieur.

Sganarelle

C’est fort bien fait. Oui, ce grand médecin, au chapitre qu’il a fait de la nature des animaux, dit… cent belles choses ; et comme les humeurs qui ont de la connexité ont beaucoup de rapport ; car, par exemple, comme la mélancolie est ennemie de la joie, et que la bile qui se répand par le corps nous fait devenir jaunes, et qu’il n’est rien plus contraire à la santé que la maladie, nous pouvons dire, avec ce grand homme, que votre fille est fort malade. Il faut que je vous fasse une ordonnance.

Gorgibus

Vite une table, du papier, de l’encre.