Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 1.djvu/340

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Lélie est fort bien fait ; mais apprends qu’il n’est rien
Qui ne doive céder au soin d’avoir du bien,
Que l’or donne aux plus laids certain charme pour plaire,
Et que sans lui le reste est une triste affaire.
Valère, je crois bien, n’est pas de toi chéri ;
Mais s’il ne l’est amant, il le sera mari
Plus que l’on ne le croit, ce nom d’époux engage
Et l’amour est souvent un fruit du mariage.
Mais suis-je pas bien fat de vouloir raisonner,
Où de droit absolu j’ai pouvoir d’ordonner,
Trêve donc je vous prie à vos impertinences,
Que je n’entende plus vos sottes doléances :
Ce gendre doit venir vous visiter ce soir,
Manquez un peu, manquez, à le bien recevoir,
Si je ne vous lui vois faire fort bon visage
Je vous… je ne veux pas en dire davantage.



Scène II



Célie, sa suivante.


La suivante

Quoi refuser Madame, avec cette rigueur
Ce que tant d’autres gens voudraient de tout leur cœur,
À des offres d’hymen répondre par des larmes
Et tarder tant à dire un oui si plein de charmes.
Hélas ! que ne veut-on aussi me marier,
Ce ne serait pas moi qui se ferait prier,
Et loin qu’un pareil oui me donnât de la peine
Croyez que j’en dirais bien vite une douzaine.
Le précepteur qui fait répéter la leçon
À votre jeune frère, a fort bonne raison,
Lorsque nous discourant des choses de la terre,
Il dit que la femelle est ainsi que le lierre,
Qui croît beau tant qu’à l’arbre il se tient bien serré
Et ne profite point s’il en est séparé.
Il n’est rien de plus vrai, ma très chère maîtresse,
Et je l’éprouve en moi chétive pécheresse.
Le bon Dieu fasse paix à mon pauvre Martin,
Mais j’avais, lui vivant, le teint d’un chérubin,