Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 2.djvu/495

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Ce moi plus tôt que moi s’est au logis trouvé ;
Et j’étais venu, je vous jure,
Avant que je fusse arrivé.

Amphitryon
D’où peut procéder, je te prie,
Ce galimatias maudit ?
Est-ce songe ? Est-ce ivrognerie ?
Aliénation d’esprit ?
Ou méchante plaisanterie ?

Sosie
Non : c’est la chose comme elle est,
Et point du tout conte frivole.
Je suis homme d’honneur, j’en donne ma parole,
Et vous m’en croirez, s’il vous plaît.
Je vous dis que, croyant n’être qu’un seul Sosie,
Je me suis trouvé deux chez nous ;
Et que de ces deux moi, piqués de jalousie,
L’un est à la maison, et l’autre est avec vous ;
Que le moi que voici, chargé de lassitude,
A trouvé l’autre moi frais, gaillard et dispos,
Et n’ayant d’autre inquiétude
Que de battre, et casser des os.

Amphitryon
Il faut être, je le confesse,
D’un esprit bien posé, bien tranquille, bien doux,
Pour souffrir qu’un valet de chansons me repaisse.

Sosie
Si vous vous mettez en courroux,
Plus de conférence entre nous :
Vous savez que d’abord tout cesse.

Amphitryon
Non : sans emportement je te veux écouter ;
Je l’ai promis. Mais dis, en bonne conscience,