Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 2.djvu/586

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Voilà un coup sans doute où vous ne vous attendiez pas. C’est maintenant que je triomphe, et j’ai de quoi mettre à bas votre orgueil, et détruire vos artifices. Jusques ici vous avez joué mes accusations, ébloui vos parents, et plâtré vos malversations. J’ai eu beau voir, et beau dire, et votre adresse toujours l’a emporté sur mon bon droit, et toujours vous avez trouvé moyen d’avoir raison ; mais à cette fois, Dieu merci, les choses vont être éclaircies, et votre effronterie sera pleinement confondue.

Angélique
Hé ! je vous prie, faites-moi ouvrir la porte.

George Dandin
Non, non : il faut attendre la venue de ceux que j’ai mandés, et je veux qu’ils vous trouvent dehors à la belle heure qu’il est. En attendant qu’ils viennent, songez, si vous voulez, à chercher dans votre tête quelque nouveau détour pour vous tirer de cette affaire, à inventer quelque moyen de rhabiller votre escapade, à trouver quelque belle ruse pour éluder ici les gens et paraître innocente, quelque prétexte spécieux de pèlerinage nocturne, ou d’amie en travail d’enfant, que vous veniez de secourir.

Angélique
Non : mon intention n’est pas de vous rien déguiser. Je ne prétends point me défendre, ni vous nier les choses, puisque vous les savez.

George Dandin
C’est que vous voyez bien que tous les moyens vous en sont fermés, et que dans cette affaire vous ne sauriez inventer d’excuse qu’il ne me soit facile de convaincre de fausseté.

Angélique
Oui, je confesse que j’ai tort, et que vous avez sujet de vous plaindre. Mais je vous demande par grâce de ne m’exposer point maintenant à la mauvaise humeur de mes parents, et de me faire promptement ouvrir.

George Dandin
Je vous baise les mains.

Angélique
Eh ! mon pauvre petit mari, je vous en conjure.

George Dandin
Ah ! mon pauvre petit mari ? Je suis votre petit