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LIVRE I, CHAP. X

L’aristocratie dominait, et ne laissait pas surgir un tyran. Elle avait de bonne heure pris en main la direction politique dans les cités ; et, en cas de besoin, elle trouvait un sûr appui dans le pouvoir fédéral central. Mais on devait craindre de la voir dégénérer peu à peu en oligarchie alors surtout que les familles privilégiées s’associaient entre elles, et s’entr’aidaient de cité à cité. Telle était, à n’en pouvoir douter, cette association des « Amis » fondées dans les conditions d’une solidarité réciproque, et à laquelle se rattache le nom de Pythagore. Elle prescrivait « d’honorer à l’égal des dieux » les citoyens de la haute classe ; « d’assujettir à l’égal des animaux » les habitants des classes serves. La mise en pratique de ces théories iniques amena promptement une réaction terrible. Les Amis furent détruits, et l’ancienne confédération fut renouvelée. Mais le mal était sans remède. Les querelles furieuses des partis, les soulèvements en masse des esclaves, les embarras sociaux de toute espèce, les applications maladroites d’une philosophie politique quasi-impraticable ; bref, tous les maux d’une civilisation dégénérée, concoururent comme à l’envi à jeter la perturbation au sein des cités achéennes, et amenèrent la chute de leur puissance. — Qu’on ne s’étonne donc pas du peu d’influence réelle exercée par les Achéens sur la civilisation italienne. Cette influence était réservée aux autres colonies grecques. Les colons agriculteurs des villes achéennes ne la recherchaient nullement au delà de leurs frontières ; tandis que les cités commerçantes, au contraire, ne visaient qu’à l’étendre. Chez eux, les Achéens réduisaient les indigènes en esclavage ; étouffaient tous les germes nationaux, sans ouvrir aux Italiens une voie nouvelle au sein de l’Hellénisme. Aussi les institutions grecques de Sybaris et de Métaponte, de Crotone et de Posidonie, après s’être montrées d’abord pleines de vie, en dépit de toutes les disgrâces politiques,