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L’AGRICULTURE, L’INDUSTRIE ET LE COMMERCE

le battage, toujours les mêmes, se faisaient d’une manière imparfaite. L’obstacle au progrès tenait moins peut-être à la routine obstinée du paysan, qu’à l’infériorité marquée des arts mécaniques. L’italien, en effet, avec son esprit éminemment pratique, n’éprouvait pas, le moins du monde, un engouement sentimental pour les vieilles méthodes de ses pères ; il avait su fort bien et de bonne heure inventer, ou emprunter à ses voisins, les procédés meilleurs, la culture des plantes fourragères, l’irrigation des prairies. La littérature romaine a débuté par des traités didactiques sur l’économie agricole. Au travail opiniâtre et réfléchi succédait l’époque bénie du repos. À ce moment encore intervenait la religion, adoucissant, même pour le plus humble, les fatigues de son existence, et lui marquant les heures de relâche, ou les récréations d’un plus libre loisir. Quatre fois par mois, tous les huit jours, l’un dans l’autre (nonœ[1]), le paysan va en ville pour ses achats, ses ventes et ses autres affaires. De jours non ouvrables, il n’y a à proprement parler que les fêtes consacrées, et avant tout le mois des fêtes après les semences d’hiver (feriæsementivæ)[2]. Alors la charrue se reposait par l’ordre des dieux, et la religion accordait du repos aussi bien au valet et au bœuf, qu’au laboureur et au maître.

Telles étaient les pratiques rurales des plus anciens temps. Si le paysan administrait mal, s’il dissipait la fortune héréditaire, les intéressés n’avaient d’autre recours devant la loi que celui de le faire mettre en tutelle, à l’égal d’un insensé (p. 194). Les femmes étant essentiellement incapables de disposer, quand elles se mariaient,

  1. [Annum ita diviserunt, ut nonis modo diebus urbanas res usurparent, reliquis VII ut rura colevent. — Varr. R. R. 2, prœfat. 51.]
  2. [Ovide, les décrit : Fast., 1, 663 et suiv. Ces fêtes étaient celles de tout le pagus, d’où elles sont aussi appelée Pagenalia. Elles avaient lieu en janvier.