Page:Mommsen - Histoire romaine - Tome 8.djvu/208

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grands mots pleins d’ennui: on aimait mieux, quittant les sentiers pratiques de la vie, se rejeter les uns, dans l'apathie (απαθεια) énervée ; les autres, dans l’ironie qui nie tout : de la, les progrès croissants de l’épicuréisme dans les grands cercles de Rome : de là, le droit de cité conquis par les cyniques de la secte de Diogène. Condamnée qu’elle était à la sécheresse et à l’infécondité, alors que, loin de chercher le chemin de la sagesse dans la rénovation des doctrines traditionnelles, elle se contentait du présent, et ne prêtait foi qu’à la sensation matérielle, cette philosophie valait encore mieux que le cliquetis de mots et que les notions vides de la sagesse stoique ; et le cynisme l’emportait sur tous les systèmes philosophiques d’alors, en ce que, les méprisant tous, hommes et sectes, il se contentait de n’être point un système, avantage immense, en verité. Donc, dans les deux armées de l’épicuréisme et du cynisme, on menait guerre ardente, et non sans succès, contre le portique: ici, prechant pour les gens sérieux, l’épicurien Lucrèce 1, avec l’accent puissant d’une conviction profonde et d’un saint zèle, s’attaquait. aux dieux, à la providence divine des stoïques, a leurs doctrines, à la théorie de l’immortalité de l'âme humaine : là, devant le gros public qui aime à rire, Varron, le cynique, décochait les flèches rapides de ses satires lues de tous, et frappait au but encore plus sûrement 2. Et tandis que les meilleurs de l’ancienne génération se montraient hostiles pour le Portique, les hommes de la génération nouvelle, Catulle, par exemple, se tenaient simplement à distance, et leur critique n’en était_que plus vive, par cela qu’ils ignoraient et voulaient ignorer.

Les religions orientales

Cependant, à coté de la foi incroyante maintenue par les seules convenances politiques, on se rattrapait largement ailleurs. L’incroyance et la superstition, ces deux

‘ [V. infra].

’ [V. infra, les Satyres Menippées.]