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AMOUR


À votre amour pourtant l’on refuse de croire.
Arracher notre cœur à la déception,
A cette vanité d’un plaisir Illusoire,
Tel était votre espoir, votre aspiration !

C’est ce qui vous mena de la crèche au calvaire,
Trente-trois ans vous tint dans ce sentier sanglant ;
C’est ce qui vous tira, lorsqu’entre ciel et terre
Vous pendiez par trois clous, votre Sitio brûlant.

Arrière cependant ! crient mille voix rebelles,
Se livrer à vous c’est se vouer au néant.
C’est étouffer son cœur, c’est se couper les ailes,
C’est creuser un abîme à tout jamais béant.

Blasphème ! Doux Jésus, ici mon cœur réclame.
Être à vous ce n’est pas s’étouffer sans retour :
Non, non ! Il n’est pas vrai, vous emparant d’une âme.
Que vous y tarissiez les sources de l’amour.

Non, vous n’arrêtez pas l’essor de la nature ;
Non, non, vous n’êtes pas ce soleil desséchant !
Mais sous votre lumière aussi chaude que pure,
Plus limpide et plus fort l’amour va s’épanchant.

Je vous prends à témoin, vous, légions sacrées
De saints, qui, défiant les sarcasmes moqueurs,
Avez de Jésus-Christ arboré les livrées,
Avait-il, ce Jésus, atrophié vos cœurs ?

N’aimiez-vous plus, martyrs, à qui ni tyrannie,
Ni feu, ni plomb fondu, ni chevalets, ni fers
Ne purent arracher un mot de félonie ?
Était-ce, cœur éteint, que vous mouriez si fiers ?

Était-il donc glacé tout le sang de vos veines,
Grand Paul, vous que faisaient tressaillir les soufflets
Pour le Christ reçus, vous, plus heureux de vos chaînes
Que femme ne le fut des plus fins bracelets ?