Page:Monselet - La Franc-maçonnerie des femmes, 1861.djvu/100

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— Me reste-il encore un sacrifice à vous faire, après celui de ma dignité ? Je ne crois pas. Séparons-nous donc, Marianna, et cette fois pour toujours.

— Pour toujours ? répéta-t-elle machinalement.

— Adieu, lui dit-il.

— Adieu, et merci éternel ! dit Marianna en sortant à reculons.

Dix minutes après, Irénée descendait dans les jardins de la mairie, pour respirer. Il étouffait.

— Ah ! vous voilà ! s’écria M. Blanchard en le prenant par le bras ; venez ! la marquise de Pressigny et la comtesse d’Ingrande sont arrivées.

Il se laissa entraîner. Tous deux pénétrèrent dans la salle du concert. Les douze chanteurs montagnards terminaient un chœur national, où ils avaient parfaitement donné l’idée d’une rangée de tuyaux d’orgue. L’auditoire entier applaudissait, à l’exception de madame d’Ingrande et de sa sœur. On sait qu’elles ne s’étaient rendues à l’invitation du maire de Teste qu’à la dernière extrémité, et parce qu’elles ne pouvaient pas faire autrement. Du reste, elles avaient suffisamment témoigné de leur mauvaise grâce par la simplicité exagérée de leur mise, et en arrivant aussi tard que possible. Néanmoins, elles avaient amené Amélie.

Rien de tout cela n’avait empêché le maire de la Teste, gentilhomme ruiné et ensablé, ancien page du roi Charles X, de leur faire un accueil empreint de toutes les traditions de la vieille cour. Les places les meilleures leur avaient été réservées, c’est-à-dire celles du devant ; mais, par caprice, les deux sœurs s’étaient obstinées à ne pas vouloir bouger du coin le plus obscur du salon. Ce fut de cet endroit qu’elles aperçurent Irénée. Elles lui firent signe d’approcher.

— Mais venez donc, lui dit la comtesse d’Ingrande, lorsqu’il