Page:Monselet - La Franc-maçonnerie des femmes, 1861.djvu/221

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— Fasse le ciel que vous soyez récompensé de votre héroïsme ! Mais je crains fort que le ciel de cette nuit ne vous accorde autre chose qu’un rhume. Ce sera la faute de cette petite folle d’Amélie. Voilà un endroit bien choisi, ma foi, pour ses confidences de pensionnaire.

Le comte leva les yeux sur les fenêtres de la maison.

— Ah ! mon Dieu ! s’écria-t-il.

— Quoi donc, monsieur le comte ?

— N’apercevez-vous pas de lumière au deuxième étage ?

— Au deuxième étage, oui.

— C’est effrayant !

— Que trouvez-vous d’effrayant à cela, monsieur le comte ?

— Derrière les rideaux, j’ai vu passer la silhouette de ma femme.

— Croyez-vous ?

— Oh ! je l’ai bien reconnue. Morbleu ! ce serait d’un ridicule achevé d’être venu m’enrhumer sous les fenêtres de ma femme. Je crois que j’en voudrais pendant huit jours à Amélie… Mais voyez si cette méchante enfant arrivera ? Qu’est-ce qu’elle peut avoir à me communiquer ? Son bonheur, son avenir, dit-elle. Bah ! quelque enfantillage, probablement : sa mère qui l’aura contrariée… ou autre chose. Bon ! voilà que je commence à tousser.

— Monsieur le comte ?

— Qu’y a-t-il ?

— J’entends des pas.

— En êtes-vous sûr ?

— On vient de ce côté, on court…

— On court ? c’est elle ; quelle imprudence ! pour se heurter aux arbres… Tenez, mon cher, cachez-vous là, derrière ce bosquet, dit le comte, et surtout pas un mouvement. Vous savez, un rien effarouche les jeunes filles ; et, bien que ce qu’elle ait à me conter soit de peu d’importance sans doute, il ne faut pas cependant qu’elle se croie entendue par un autre que son père.

Le mystérieux compagnon du comte d’Ingrande obéit. Il était temps.

— Ô mon père ! que vous êtes bon d’être venu ! s’écria Amélie en lui présentant son front à baiser.