Page:Monselet - La Franc-maçonnerie des femmes, 1861.djvu/239

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Midi la donne. Je pars pour les îles d’Hyères, où le souffle de ma vie s’exhalera du moins dans le parfum des orangers.

— Vous partez, Irénée ? dit Marianna.

— Que ferais-je à Paris, la ville des souvenirs ou de l’espérance ? Il n’y a plus d’espérance pour moi, et mes souvenirs équivalent à des blessures.

— Oh ! vous avez raison ; Paris, c’est la ville atroce ! Paris, est la capitale de la douleur !

Irénée fut frappé de l’exaltation sauvage qui accompagnait ces paroles. Une idée traversa son cerveau.

— Eh bien, Marianna, s’il en est ainsi, lui dit-il, si Paris vous est odieux à ce point, que ne le quittez-vous avec moi, que ne partons-nous ensemble ? À défaut du bonheur, le repos nous est possible encore. En vous le cœur est malade, en moi le corps est brisé ; nous pouvons nous rapprocher sans défiance.

— Partir ! murmura Marianna en réfléchissant.

— La vie nous sera aisée aux jardins d’Hyères, continua-t-il : quelques livres pour nous, du pain pour les pauvres, le plaisir d’apprendre et la joie de donner, il n’en faut pas davantage. Avec un tel régime, vous pouvez guérir, Marianna ; moi, je suis condamné, je sortirai le premier de notre retraite ; mais qu’importe ? N’était-ce pas mon âme qui était avec vous ? elle y sera éternellement, j’en suis certain. La vie n’est circonscrite aux limites de la terre que pour ceux qui n’ont pas cru à leur immortalité.

— Ô Irénée ! s’écria Marianna, subjuguée par cette transfiguration angélique, si j’étais assez pure pour vivre sous votre toit, je voudrais mettre mon orgueil à vous servir à genoux. Mais je ne puis que trembler et rougir sous votre regard.

— Placez plus haut votre dignité.

— Au lieu de me rendre douleur pour douleur, justice pour ingratitude, vous me tendez la main, vous accourez à mon premier cri de détresse. N’est-ce pas encore me punir que de m’accabler du poids de votre dévouement !

— Ai-je le droit de punir ? reprit-il ; cessez de vous abuser