Page:Monselet - La Franc-maçonnerie des femmes, 1861.djvu/252

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Devant une invitation aussi pressante, la marquise de Pressigny ne pouvait pas hésiter. Il s’agissait d’un testament à recevoir, car l’hérédité n’était pas une des bases de la Franc-maçonnerie des femmes. Chacune avait le droit de désigner celle qu’elle désirait voir appelée à sa succession mystérieuse.

La marquise fit immédiatement demander des chevaux de poste pour le soir. À peine cet ordre était-il donné qu’on lui annonça une visite. Elle se leva pour recevoir une femme qui était vêtue de deuil. Mais elle recula immédiatement à cette vue.

— Est-ce que je me trompe ? murmura-t-elle.

— Non, madame la marquise, vous ne vous trompez pas ; je suis bien la Marianna, ou, si vous l’aimez mieux, Marianna Rupert.

— Vous ! dit la marquise en joignant les mains de terreur.

— Ne vous attendiez-vous point à me revoir, madame ?

— Mais, vous-même, ignorez-vous donc qu’on vous croit morte ?

— Oh ! vous vous êtes bien hâtée de croire à ma mort ! dit Marianna avec un sourire funeste.

— J’ai partagé l’erreur de tout le monde, reprit la marquise en frémissant.

— Vraiment ?

— À Marseille, où j’ai écrit, on raconte encore les moindres circonstances de votre suicide.

— Ah ! vous avez écrit ?

— Une personne de notre association m’a répondu : c’est sa conviction qui a décidé de la mienne. Plus tard, cette nouvelle a été confirmée par les journaux.

— Je l’ai lue, en effet, dit Marianna avec sang-froid.

— Mais vous, madame, qui paraissez me blâmer d’ajouter foi à cette lugubre comédie, quel était votre but en la jouant ?