Page:Monselet - La Franc-maçonnerie des femmes, 1861.djvu/300

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ridicules. Au lieu d’être forcé d’aller retrouver chaque soir mes lares, ce sont mes lares qui me suivent partout où je vais.

— Oui, vous êtes le colimaçon de l’immeuble.

— Que me manque-t-il ici ? Après mon salon, voici ma chambre à coucher.

M. Blanchard poussa une porte qui démasqua un antre tapissé, ouaté, frangé ; quelque chose de calme qu’on n’eût jamais soupçonné et qui appelait le sommeil béat.

— Mon domestique a son hamac dans l’antichambre, continua-t-il. Nous remisons là où il me plaît. Très souvent, en été, j’ai vu lever l’aurore dans la plaine Saint-Denis.

— C’est charmant !

— Et quel bonheur de n’avoir à subir aucun voisinage incommode, de n’entendre le matin aucun de ces bruits, de ces cris, de ces miaulements, de ces tambours qui saluent l’aube de Paris ! En outre, est-il quelque chose de plus monotone et de plus bête, pour l’homme qui a une maison, que de se réveiller tous les jours en face du même mur, de la même cour ou du même jardin ? C’est à donner le spleen. Moi, je varie éternellement mes points de vue.

— Tout cela ne m’explique pas l’affiche placée en dehors de… votre hôtel.

— Quelle affiche ?

— AUJOURD’HUI, RELÂCHE.

— C’est facile à saisir, cependant. La ferme et l’étendue de mon domicile m’exposent, je ne fais aucune difficulté pour en convenir, à des méprises dont la répétition pourrait me fatiguer quelquefois. Dans les endroits où je m’arrête, on me prend volontiers pour un dentiste, un marchand de crayons ou un jongleur.

Philippe ne put s’empêcher de rire.

— C’est pour éviter les rassemblements et les questions que j’ai autorisé mon valet de chambre à apposer cette affiche inamovible : AUJOURD’HUI, RELÂCHE. Cela écarte ou, du moins, cela ajourne les curiosités. Il ne m’en faut pas davantage.

— Bravo ! monsieur Blanchard, vous avez réponse à tout, dit Philippe en se levant.