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Page:Montépin - La Porteuse de pain, 1973.djvu/134

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qu’il y a de meilleur. Je ne regarde pas au prix ! Je suis riche ! »

Et, après avoir rempli d’eau-de-vie la demi-tasse, il jeta littéralement dans son gosier cette forte dose d’alcool.

« Enfin, je vais donc savoir ! pensa Ovide qui dit tout haut : Tu es riche, oui… grâce à l’invention que tu as faite.

– Et que j’ai vendue à James Mortimer…

– Non. Je parle de la machine inventée par toi pendant les cinq années que nous avons passées sans nous voir. »

L’ex-contremaître eut un éclat de rire étrange.

« Ah ! ah ! ah ! s’écria-t-il. Est-ce que je t’avais jamais vu ? Est-ce que je te connaissais, toi, Ovide Soliveau ? Est-ce que je suis de Dijon ? Est-ce que je me nomme Paul Harmant ?… Allons donc ! Paul Harmant est mort. Il est mort à l’hôpital de Genève… J’étais son camarade d’atelier… Il m’avait confié son livret pour le renvoyer à sa famille… et comme il fallait sauver ma tête… j’ai pris le nom de Paul Harmant. »

La face de Jacques prenait une expression effrayante.

« Est-ce que je n’ai pas bien fait ? reprit-il en marchant vers Ovide qui reculait devant lui. Tu comprends !… j’avais incendié l’usine d’Alfortville, où j’étais contremaître ; j’avais assassiné l’ingénieur Labroue, mon patron ; j’avais volé ses plans de machines et pris dans sa caisse cent quatre-vingt dix mille francs… une fortune… je revins sur le lieu du sinistre après le vol. Je me distinguai par mon ardeur. Je me précipitai dans les flammes pour sauver la caisse que je venais de vider ; puis, au moment où le pavillon s’écroulait, je sautai par une fenêtre donnant sur la campagne… On me croyait enseveli sous les décombres, victime de mon dévouement, et Jeanne Fortier, de qui j’avais à me venger, était condamnée à ma place… Je filai en Angleterre sous le nom de Paul Harmant, le mien aujourd’hui, et je m’embarquai pour New York… Sur le Lord-Maire je rencontrai un imbécile, un certain Ovide Soliveau, à qui je persuadai que j’étais son cousin… Grâce à mes che-