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Page:Montépin - La Porteuse de pain, 1973.djvu/195

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votre appui tout-puissant et me présenter à monsieur votre père, à qui j’apporte une lettre de recommandation de mon ami Georges. »

Lucien parlait d’un ton respectueux, mais qui n’avait rien de trop humble, ni de platement obséquieux. Mary ferma les yeux sous la caresse de la voix douce de son visiteur.

« Asseyez-vous, monsieur, dit-elle en désignant de la main un siège, nous allons causer… M. Darier m’a dit que jusqu’à ce jour l’occasion d’utiliser vos aptitudes vous avait manqué, et que vous désiriez trouver une position dans la grande usine que mon père doit ouvrir.

– Cette position, mademoiselle, si elle m’était donnée, assurerait mon avenir, interrompit Lucien.

– J’ai répondu à M. Darier que les concurrents étaient nombreux : mais en même temps je lui ai promis de faire tout ce qui dépendrait de moi, afin d’obtenir que vous soyez préféré. Pour arriver à ce but, il importe que vous soyez le premier à voir mon père. Pour vous, qui êtes l’ami de M. Darier et qui méritez personnellement l’intérêt le plus sérieux, je ferai ce que je n’ai jamais fait et j’userai de mon influence… si tant est que cette influence existe, je vous présenterai à mon père et j’appuierai votre requête.

– C’est du fond du cœur que je vous remercie, mademoiselle… » répondit Lucien très ému.

Mary écoutait le jeune homme avec un trouble profond, dont elle ne se rendait pas bien compte, mais qui lui semblait délicieux. Ses yeux se fixaient avec complaisance sur la figure franche et loyale du fils de Jules Labroue.

« Je ferai donc tout ce qui dépendra de moi, reprit-elle : j’aurais voulu vous voir aujourd’hui même emporter d’ici une certitude au lieu d’une espérance… malheureusement c’est impossible. Mon père n’est point de retour. J’ai reçu de lui, hier, une dépêche m’annonçant qu’il était obligé de passer un jour de plus en Belgique, et qu’il n’arriverait que ce soir. Ce n’est qu’un retard sans importance… fit Mary en devenant pourpre à son insu. Mais il faudra revenir demain.