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Page:Montépin - La Porteuse de pain, 1973.djvu/21

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savait que je vous ai laissé sortir, je serais réprimandée.

– Le patron est absent, répondit l’ajusteur.

– Demandez une permission au contremaître.

– Je l’ai fait. Il me l’a refusée. Alors je la prends, tant pis ! Je cours à la maison et, si tout va bien, je rapplique ici au pas accéléré. Voyons, m’ame Fortier, prouvez que vous avez bon cœur. Ouvrez-moi la porte. Je ne dirai pas que je suis sorti, et en rentrant je retournerai à mon étau. On ne se sera seulement point aperçu de mon absence. Si on sait que je suis sorti, je dirai que vous n’étiez point dans votre loge, que j’y suis entré, que j’ai tiré le cordon moi-même. Le temps s’écoule, m’ame Fortier. Laissez-moi allez voir ma femme…

– Je risque ma place, fit-elle, mais je n’ai pas le courage de vous refuser. »

En même temps, elle tira le cordon.

« Merci ! merci », cria l’ouvrier en s’élançant dehors.

« J’ai peut-être eu tort, pensait la jeune femme, mais les règlements sont trop rigoureux. Il avait les larmes dans les yeux, ce pauvre Vincent ! »

Jacques Garaud, après avoir donné un coup d’œil rapide aux diverses salles, était revenu à l’atelier de l’ajustage où il voulait surveiller les pièces d’un moteur à air comprimé qui devait être livré le lendemain. Il s’approcha de l’ouvrier chargé du montage.

« Vous avancez ? lui demanda-t-il.

– Oui, monsieur Garaud, je n’attends plus que le collier qu’apprête Vincent. Quand je l’aurai, il ne me faudra pas plus d’une demi-heure pour tout mettre en place. »

Jacques se dirigea vers l’étau de Vincent. La place de l’ajusteur était vide. Sur l’étau à côté du collier, se voyait le tablier de travail. Le contremaître fronça les sourcils.

« Où est Vincent ? demanda-t-il à un ouvrier voisin.

– Je ne sais pas, monsieur Jacques, répondit l’homme. Quand vous l’avez quitté, je l’ai vu prendre sa casquette et filer. »

Jacques fit un geste de colère.