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Page:Montépin - La Porteuse de pain, 1973.djvu/251

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– Je déjeunerai, oui, mais il est moins certain que je dîne.

– Alors mon beau rêve s’évanouit !

– Qu’avais-tu rêvé, chère enfant ?

– Que tu inviterais Lucien Labroue à dîner ici.

– Tu vois que c’était impossible.

– À déjeuner, du moins.

– Je ne le pouvais pas davantage, car M. Labroue a certainement de nombreuses courses à faire avant son départ. »

Mary tressaillit et devint très pâle.

« Avant son départ ! répéta-t-elle d’une voix altérée. M. Labroue s’éloigne de Paris ? Pourquoi ?

– Pour les affaires de la maison. Il va à Bellegarde.

– Combien de temps durera son absence ?

– Trois semaines à peu près, et ce travail est un premier pas dans la voie d’une association.

– S’il en est ainsi, j’en prends mon parti… Mais enfin, me voilà pour la journée entière toute seule…

– Cela m’afflige autant que toi, tu le sais. Je te promets d’ailleurs un prochain dédommagement. »

Confiante en ce qu’elle venait d’apprendre, la jeune fille, très ennuyée et très contrariée du départ de Lucien, ne s’en alarmait point. Elle n’y voyait que la preuve de confiance et d’estime donnée par son père à son fiancé. Ainsi rassurée, Mlle Harmant remonta dans son appartement et y resta jusqu’à onze heures. Quand elle descendit, elle avait une toilette très élégante.

« Mignonne, comme te voilà belle ! s’écria le faux Paul Harmant. Tu m’éblouis ! As-tu donc des projets ?

– J’ai le projet d’aller voir mes amies. Je m’ennuierais à la maison. Je resterai dehors jusqu’au dîner. »

À une heure on vint prévenir la jeune fille que la voiture attendait devant le perron. Elle descendit et s’installa.

« Quai Bourbon, numéro 9 », dit Mary au cocher.

* * *

Ce n’avait été qu’un jeu pour Ovide Soliveau de suivre Lucien Labroue. Déguisé en maçon, il l’avait filé