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Page:Montépin - La Porteuse de pain, 1973.djvu/288

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« Partez bien vite, dit-il, voici de l’argent. Vous prendrez une voiture pour aller à la gare et une autre pour en revenir… »

Ce disant il mettait quatre pièces de cent sous dans la main de Jeanne Fortier. À dix heures dix-neuf minutes elle descendait à Bois-Colombes et se dirigeait vers la Garenne par le même chemin qu’elle avait suivi la veille. Jeanne Fortier eut bientôt gagné la route de Paris. Elle fit halte devant la maison de Mme Lebret, saisit la chaîne de la sonnette et se mit à l’agiter à tour de bras. Enfin une voix cria du fond du jardin :

« Qui est là ? qui sonne ?

– C’est une lettre que j’apporte de la part de M. Lebret dont la femme se meurt… » répondit Jeanne.

La bonne vint lui ouvrir, la reconnut et lui dit :

« C’est vous qui êtes venue hier. Elle va donc bien mal, la fille à madame ?

– La pauvre femme n’a plus que quelques heures à vivre… »

Mme Lebret, après avoir passé en toute hâte un jupon et une camisole, était descendue.

« Une lettre pour vous, madame… lui dit vivement Jeanne, une lettre très pressée de votre gendre, M. Lebret… »

Mme Lebret prit la lettre d’un air imposant, déchira l’enveloppe et lut, sans la moindre trace d’émotion.

« C’est bien…, dit-elle ensuite froidement. Monsieur mon gendre a mis les pouces… Justine, donnez-moi vite une robe, une pelisse, et habillez-vous… Nous partirons pour Paris par le dernier train. »

Elle ajouta, en s’adressant à la porteuse de pain :

« Attendez-moi ici. Ça ne sera pas long… »

* * *

À la villa de M. le maire, Lucie avait achevé sa besogne. L’heure avançait, et pour rien au monde elle n’aurait voulu manquer le train de minuit. Elle avait devant elle quarante minutes pour gagner la gare. C’était plus de temps qu’il ne lui en fallait. Cependant elle hâtait le pas.