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Page:Montépin - La Porteuse de pain, 1973.djvu/343

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parler à cœur ouvert. Comment avez-vous trouvé ma fille ?

– Je l’ai trouvée un peu amaigrie, monsieur, et le visage altéré. Les médecins devraient, je crois, s’occuper sérieusement de son état de faiblesse, de son dépérissement croissant. »

Le millionnaire appuya ses coudes sur le bureau et prit sa tête dans ses mains. Deux larmes glissèrent entre ses doigts.

« Oui, dit-il ; la vie de ma fille est menacée, la vie de mon enfant que j’aime plus que tout au monde. Mary est en danger, les médecins me l’ont dit, mais elle n’est point condamnée sans appel. À côté du mal il y a le remède. Ce remède, c’est le mariage…

– Le mariage… répéta le jeune homme, péniblement impressionné de la tournure que prenait l’entretien.

– Oui, continua Paul Harmant, le mariage lui rendrait la santé… Mary a deux maladies : l’une qui lui vient de sa pauvre mère et dont elle peut guérir ; l’autre qui lui vient de son cœur et dont vous êtes la cause. Celle-ci joignant à l’autre la conduira promptement au tombeau, si vous êtes sans pitié. Mon cher enfant, la vie de ma fille chérie est entre vos mains. Je vous ai demandé de réfléchir. Je vous ai proposé de vous associer à ma fortune en vous donnant la main de ma fille. Aujourd’hui, cette fortune, je vous l’offre tout entière si vous sauvez mon enfant. Elle va mourir si vous la repoussez. Refuserez-vous de la prendre pour femme ?

– Oh ! monsieur, s’écria Lucien, si vous saviez ce que j’ai souffert depuis le moment où l’amour de Melle Mary m’a été révélé, vous auriez pitié de moi. Ne vous ai-je pas dit quel était l’état de mon cœur ?

– Oui, c’est vrai, vous me l’avez dit loyalement, répliqua le millionnaire, mais j’ai cru qu’il s’agissait d’un de ces caprices qui ne comptent point dans l’existence. Vous n’éprouvez aucun sentiment passionné pour ma fille, qu’importe ! Est-ce que l’amitié ne vaut pas l’amour ? L’amour viendra, comme il est venu chez moi