Aller au contenu

Page:Montépin - La Porteuse de pain, 1973.djvu/420

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

belle créature qu’autrefois il avait aimée d’un amour de fauve. Il frissonna de la tête aux pieds.

Il se jugea perdu. Il crut que Jeanne allait le reconnaître.

Son épouvante fut d’ailleurs de courte durée. Il comprit qu’il courait à sa perte s’il ne tenait résolument la tête à l’orage grondant autour de lui. Reprenant son aplomb habituel, il répondit en exagérant son accent étranger.

« Je ne comprends pas. Que signifie cela ?

– Cher monsieur, dit Georges. Il s’agit de Lucie Fortier…

– De Lucie Fortier ? Que puis-je faire pour cette enfant qui a le malheur d’être fille d’une mère flétrie par la justice ?

– Vous pouvez lui rendre la vie, monsieur ! s’écria Jeanne. Vous lui avez pris pour votre fille celui qu’elle aimait, et votre fille va vivre heureuse et riche, et Lucie va mourir désespérée…

– Eh ! répliqua Paul Harmant, que puis-je à cela moi ? Est-ce ma faute si cette Lucie est fille d’une condamnée ?

– Et vous ne trouvez pas d’autre remède à son mal que de l’insulter de nouveau ? » dit Jeanne presque menaçante.

Une inspiration diabolique traversa l’esprit de Jacques.

« Je trouve que vous le prenez bien haut ! fit-il. On pourrait croire que des liens plus étroits qu’une amitié banale vous attachent à cette fille ! En rendant impossible ce monstrueux mariage, j’ai rempli mon devoir. Maintenant il m’en reste un autre tout tracé. La façon dont vous plaidez la cause de Lucie Fortier m’a révélé votre identité. Vous n’êtes pas Lise Perrin… vous êtes la condamnée d’Alfortville… vous êtes l’évadée de Clermont… vous êtes Jeanne Fortier… »

En entendant son nom, Jeanne se sentit chanceler. Jacques Garaud poursuivit, s’adressant à Georges :

« Ce sera rendre service à la société ainsi qu’à la