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Page:Montépin - La Porteuse de pain, 1973.djvu/447

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Donne-moi ton chapeau et ton pardessus et prends les miens. »

L’échange de vêtements et de coiffure fut opéré.

Le Dijonnais, baissant la glace de devant, jeta ces mots :

« Allez directement place de l’Opéra. Vous vous arrêterez en face du café du Grand Hôtel. Toi, poursuivit Ovide en s’adressant à Paul Harmant, tu mettras pied à terre. Amanda te prendra pour moi, et trompée par le costume elle te suivra. Pendant ce temps, j’irai commander notre dîner chez Brébant.

– Mais que ferai-je lorsque je serai descendu ?

– Vas au café, pour qu’elle s’aperçoive de l’erreur. Puis, lorsque la voiture d’Amanda aura tourné bride, tu viendras me rejoindre.

– C’est convenu. »

Un quart d’heure plus tard, les deux fiacres arrivaient place de l’Opéra. Les choses se passèrent alors de la façon prévue par Ovide. Duchemin, lorsqu’il vit descendre Paul Harmant, vêtu du paletot sombre et coiffé du petit chapeau rond, le prit pour le baron de Reiss.

« Ne bougez pas de là, dit-il à son cocher, l’autre peut partir : c’est celui-là seulement qui m’intéresse. »

Le fiacre d’Ovide s’éloignait déjà rapidement. Jacques Garaud alla s’installer à une table placée sous les globes de cristal d’une gerbe de becs de gaz. Il faisait face à la place de l’Opéra, par conséquent à Raoul Duchemin. Ce dernier ne put contenir une exclamation de colère.

« Ces gens-là se sont aperçus qu’on les suivait, murmura-t-il, et ils ont changé de costume. »

Pendant quelques secondes il s’absorba dans l’amertume de sa déception, puis il donna l’ordre au cocher de le reconduire rue des Dames, où Amanda l’attendait avec impatience.

Duchemin raconta sa mésaventure. Malgré l’insuccès complet de son associé, la jeune femme ne put s’empêcher de rire.

« Tu trouves ça drôle, fit Raoul, furieux.

– Ma foi, oui. C’est exaspérant, mais c’est drôle…