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Page:Montépin - La Porteuse de pain, 1973.djvu/89

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« Dormez en paix, leur dit la sœur du desservant. On viendra vous réveiller pour le déjeuner. »

Étienne Castel et l’abbé Laugier, quand elle les rejoignit, causaient, cherchant à deviner quel concours de circonstances avait conduit à la porte de la cure, exténuée de fatigue et mourant de faim, la pauvre Jeanne Fortier.

« Les jeunes filles trompées, les jeunes femmes abandonnées par leurs maris et forcées de lutter avec un enfant contre les difficultés de la vie sont nombreuses, reprit Étienne. L’infortunée qui nous occupe est peut-être de celles-là.

– Elle n’appartient point à ce pays, dit Clarisse ; sa fatigue prouve qu’elle vient de loin. Et son visage, portant l’empreinte de profondes douleurs, atteste qu’elle a bien souffert.

– Que feras-tu pour elle, frère ? demanda Mme Darier.

– Je veux lui donner un secours d’argent quand elle sera bien reposée, et lui laisser continuer sa route. »

La sonnette de la grille résonna de nouveau, et le facteur rural entra dans le jardin, apportant au curé le journal qui, chaque jour, à la même heure, arrivait de Paris.

M. Laugier le déplia et se mit à lire avec lenteur. Bientôt il arriva à la seconde page, où s’étalait un long article sous cette rubrique :

UN TRIPLE CRIME

L’abbé commença la lecture de cet article. Il laissa tout à coup échapper une exclamation. Étienne leva la tête.

« Vous trouvez dans le journal quelque chose qui vous intéresse, mon cher abbé ? demanda-t-il.

– Qui m’intéresse au plus haut point et qui va vous intéresser aussi, répondit le prêtre ; c’est étrange et c’est effrayant…

– Quoi donc ! » fit Mme Darier sortant en ce moment de la maison.

Étienne et Clarisse fort intrigués prirent chacun