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Page:Montépin - La Porteuse de pain, 1973.djvu/94

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suis innocente. Sur la vie de mon enfant, je vous le jure de nouveau. »

Les accents de Jeanne avaient fait passer la conviction dans l’esprit de ses auditeurs.

« Une mère qui jure sur la tête de son enfant ne saurait mentir, dit le curé. Je vous crois donc. Mais expliquez-moi comme il se fait que ce Jacques Garaud soit mort dans l’incendie, victime de son dévouement, à ce qu’on assure.

– Lui mort ! s’écria Jeanne. Allons donc !

– La note que publie le journal à ce sujet est explicite.

– Alors, je suis condamnée ! murmura la jeune femme. Si Garaud est mort, aucune puissance humaine ne pourrait me disculper. Je n’avais qu’un espoir, c’est qu’en face de moi le misérable n’oserait pas soutenir son mensonge.

– Calmez-vous, je vous prie, ma pauvre enfant ! dit le prêtre. Votre fuite a été une faute grave, mais non point un crime. Votre voix, votre regard plaident pour vous.

– Les juges écouteront-ils ma voix ? Se laisseront-ils toucher par mon regard ?… bégaya Jeanne éplorée.

– Il faut courir au-devant de l’accusation, vous présenter aux juges et leur crier : « Je suis innocente, je le jure ! » Votre serment produira-t-il sur eux l’impression qu’il a produit sur moi ? Fera-t-il pénétrer dans leur esprit la conviction qu’il a fait passer dans le mien ? Je l’ignore, je l’espère, je veux le croire, mais je ne puis l’affirmer. Ce que j’affirme, c’est que, forte de votre conscience, vous ne devez point hésiter à braver le péril, si grand qu’il soit.

– Mais si je me livre, c’est la prison qui s’ouvrira pour moi. On me séparera de mon fils !

– Malheureusement, c’est inévitable.

– Ici, répéta Jeanne. Dans votre maison.

– Ma maison n’est point inviolable, hélas !

– Mais ma petite fille qui est en nourrice… s’écria la jeune veuve en sanglotant, mais mon enfant, mon Georges. »