Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t3.djvu/150

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
58
ANALYSE RAISONNÉE


Il fait l’énumération des différentes branches des droits qui gouvernent les hommes : droit divin, droit naturel, droit ecclésiastique, droit des gens, droit politique, droit de conquête, droit civil, droit domestique.

Comme il reconnoît que la sublimité de la raison humaine consiste à savoir bien auquel de ces différents ordres se rapportent principalement les choses sur lesquelles on doit statuer, et à ne point confondre les divers droits qui doivent gouverner les hommes, il pose les limites et le point auquel tel droit doit s’arrêter, et tel autre doit commencer. Ces bornes sont tellement nécessaires à la solidité de l'édifice dans la législation, que sans elle on énerveroit cette science la plus importante, par des questions minutieuses, capables de jeter dans un chaos toute opération des lois.

Ainsi le sujet de ce livre est, ce me semble, le côté le plus lumineux de notre auteur. Il s’y distingue par l’ensemble des vues générales, et y excelle par le détail des divers droits qui concernent les successions, les devoirs des pères, des maris, des maîtres, des esclaves ; les mariages, l'empire de la cité, la propriété des biens, l'inviolabilité des ambassadeurs, les traités publics ; les crimes seulement à corriger et non à punir ; les obligations faites dans des circonstances particulières.

A travers ce détail, tout y annonce un génie accoutumé à envisager les objets sous toutes les faces, mais qui sait voir tout en grand, et montrer dans une seule pensée des choses qui en indiquent un grand nombre d’autres. En remontant à la source des lois divines, des lois de la nature, qui sont l’image de l’ordre et de la sagesse éternelle, des lois ecclésiastiques, des lois politiques, des lois des nations entre elles, notre auteur fixe, pour ainsi dire, des lignes de démarcation entre les différents droits, pour que le législateur puisse statuer avec sûreté sur les plus grandes affaires, selon leur différent ordre. Il apprend à ménager les droits sacrés de la couronne et de l'église ; à ne point décider des successions et des droits