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CHAPITRE III.


DU DROIT DE CONQUÊTE[1].


Du droit de la guerre dérive celui de conquête, qui en est la conséquence[2] ; il en doit donc suivre l’esprit.

Lorsqu’un peuple est conquis, le droit que le conquérant a sur lui suit quatre sortes de lois : la loi de la nature, qui fait que tout tend à la conservation des espèces ; la loi de la lumière naturelle, qui veut que nous fassions à autrui ce que nous voudrions qu’on nous fit ; la loi qui forme les sociétés politiques, qui sont telles que la nature n’en a point borné la durée ; enfin la loi tirée de la chose même. La conquête est une acquisition ; l’esprit d’acquisition porte avec lui l’esprit de conservation et d’usage, et non pas celui de destruction.

Un État qui en a conquis un autre le traite d’une des quatre manières suivantes : il continue à le gouverner selon ses lois, et ne prend pour lui que l’exercice du gouvernement politique et civil ; ou il lui donne un nouveau gouvernement politique et civil ; ou il détruit la société, et la disperse dans d’autres ; ou enfin il extermine tous les citoyens.

La première manière est conforme au droit des gens

  1. Lettres persanes, XCV.
  2. Sup., I, III.