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CHAPITRE VI.


DE LA CONSTITUTION D’ANGLETERRE[1].


Il y a dans chaque État trois sortes de pouvoirs : la puissance législative, la puissance exécutrice des choses qui dépendent du droit des gens, et la puissance exécutrice de celles qui dépendent du droit civil.

Par la première, le prince ou le magistrat fait des lois pour un temps ou pour toujours, et corrige ou abroge celles qui sont faites. Par la seconde, il fait la paix ou la guerre, envoie ou reçoit des ambassades, établit la sûreté, prévient les invasions. Par la troisième, il punit les crimes, ou juge les différends des particuliers. On appellera cette dernière la puissance de juger, et l’autre simplement la puissance exécutrice de l’État.

La liberté politique dans un citoyen est cette tranquillité d’esprit qui provient de l’opinion que chacun a de sa sûreté ; et pour qu’on ait cette liberté[2], il faut que le gouvernement soit tel qu’un citoyen ne puisse pas craindre un autre citoyen[3].

  1. La plupart des principes que Montesquieu pose dans ce chapitre sont tirés du Traité du gouvernement civil, de Locke, ch. XII. (Parelle.)
  2. Quand un homme auroit en Angleterre autant d’ennemis qu’il a de cheveux sur la tête, il ne lui en arriveroit rien ; c’est beaucoup, car la santé de l’âme est aussi nécessaire que celle du corps. (Montesquieu, Notes sur l’Angleterre.)
  3. A. B. Qu’un citoyen ne puisse pas craindre an citoyen.