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DE L'ESPRIT DES LOIS.


ordonnances [1] du Conseil d’Espagne, qui défendent d’employer l’or et l’argent en dorures et autres superfluités : décret pareil à celui que seroient les États de Hollande s’ils défendoient la consommation de la cannelle.

Mon raisonnement ne porte pas sur toutes les mines : celles d’Allemagne et de Hongrie, d’où l’on ne retire que peu de chose au delà des frais, sont très-utiles. Elles se trouvent dans l’État principal ; elles y occupent plusieurs milliers d’hommes qui y consomment les denrées surabondantes : elles sont proprement une manufacture du pays.

Les mines d’Allemagne et de Hongrie font valoir la culture des terres ; et le travail de celles du Mexique et du Pérou la détruit.

Les Indes [2] et l’Espagne sont deux puissances sous un même maître ; mais les Indes sont le principal, l’Espagne n’est que l’accessoire. C’est en vain que la politique veut ramener le principal à l’accessoire ; les Indes attirent toujours l’Espagne à elles.

D’environ cinquante millions de marchandises qui vont toutes les années aux Indes, l’Espagne ne fournit que deux millions et demi : les Indes font donc un commerce de cinquante millions, et l’Espagne de deux millions et demi.

C’est une mauvaise espèce de richesse qu’un tribut d’accident et qui ne dépend pas de l’industrie de la nation, du nombre de ses habitants, ni de la culture de ses terres. Le roi d’Espagne, qui reçoit de grandes sommes de sa douane de Cadix, n’est, à cet égard, qu’un particu-

  1. A. B. Des dernières ordonnances.
  2. Entendez les Indes occidentales, ou l’Amérique.