Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t6.djvu/292

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
276
SUITE DE LA DÉFENSE


portant à l’Être suprême toutes ses actions, comme à leur centre, qu’il les sanctifie et qu’il plaît à Dieu. « Celui qui n’est pas marié s’occupe du soin des choses du Seigneur. » Cela peut être vrai ; mais il l’est beaucoup plus, que cet homme ne remplit que le tiers de ses devoirs, et qu’il est coupable d’oublier ce qu’il se doit à lui-même, et ce qu’il doit aux autres.

« Je vous dis ceci, ajoute l’apôtre, pour vous porter à une plus grande sainteté. »

Le moyen est mal choisi : car il est assez mal aisé de prier Dieu quand on est sans cesse assiégé par des pensées étrangères, tenté par l’attrait de la plus aimable et de la plus invincible des passions, distrait par de continuels désirs, d’autant plus vifs qu’ils sont plus irrités, d’autant plus irrités qu’ils sont moins satisfaits. D’ailleurs, un effet, vicieux dans ce monde, ne sauroit nous assurer une meilleure place dans l’autre. Un moyen se ressent toujours du vrai ou du faux de son principe.

Saint Paul va plus loin dans les deux versets suivants. Il insinue qu’il y a une sainteté inhérente au célibat. Plus haut, il le regardoit comme un moyen de perfection ; plus bas il l’envisage comme une perfection : « Si quel qu’un, dit-il, prend une ferme résolution dans son cœur, et juge en lui-même qu’il doit conserver sa fille vierge, il fait une bonne œuvre. » Soit, pour un moment. Si le tempérament de la fille en appelle de la décision du père ; si, privée d’un mari nécessaire, elle se défait, dans les bras d’un amant, d’une virginité brûlante ; si, lasse de se combattre, de se résister, de se vaincre sans cesse, elle cède à un penchant d’autant plus fort qu’il est réprimé, l’œuvre est-elle bien prudente ?

L’apôtre donne aux pères une autorité supérieure à