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DISCOURS

il semble que vous nous racontiez l’histoire de quelque peuple sorti du nord pour changer la face de la terre. Ici nous voyons le roi, là le héros. C’est ainsi qu’un fleuve majestueux va se changer en un torrent qui renverse tout ce qui s’oppose à son passage : c’est ainsi que le ciel paroît au laboureur pur et serein, tandis que dans la contrée voisine il se couvre de feux, d’éclairs et de tonnerres.

Vous m’avez, messieurs, associé à vos travaux ; vous m’avez élevé jusqu’à vous, et je vous rends grâces de ce qu’il m’est permis de vous connoître mieux, et de vous admirer de plus près.

Je vous rends grâces de ce que vous m’avez donné un droit particulier d’écrire la vie et les actions de notre jeune monarque. Puisse-t-il aimer à entendre les éloges que l’on donne aux princes pacifiques ! Que le pouvoir immense que Dieu a mis entre ses mains soit le gage du bonheur de tous ? Que toute la terre repose sous son trône ! Qu’il soit le roi d’une nation, et le protecteur de toutes les autres ! Que tous les peuples l’aiment, que ses sujets l’adorent, et qu’il n’y ait pas un seul homme dans l’univers qui s’afflige de son bonheur, et craigne ses prospérités ! Périssent enfin ces jalousies fatales qui rendent les hommes ennemis des hommes ! Que le sang humain, ce sang qui souille toujours la terre, soit épargné, et que, pour parvenir à ce grand objet, ce ministre[1] nécessaire au monde, ce ministre tel que le peuple françois auroit pu le demander au ciel, ne cesse de donner ces conseils qui vont au cœur du prince, toujours prêt à faire le bien qu’on lui propose, ou à réparer le mal qu’il n’a point fait, et que le temps a produit !

Louis nous a fait voir que, comme les peuples sont sou-

  1. Le cardinal de Fleury. (M.)