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ÉLOGE

il empêcha l’armée portugaise d’aller à Madrid. Son armée étoit plus foihle des deux tiers ; les ordres de la cour venoient coup sur coup de se retirer et de ne rien hasarder. Le duc de Berwick, qui vit l’Espagne perdue s’il obéissoit, hasarda sans cesse et disputa tout. L’armée portugaise se retira ; M. le duc de Berwick en fit de même. A la fin de la campagne, le duc de Berwick reçut ordre de retourner en France. C’étoit une intrigue de cour[1] ; et il éprouva ce que tant d’autres avoient éprouvé avant lui, que de plaire à la cour est le plus grand service que l’on puisse rendre à la cour, sans quoi toutes les œuvres, pour me servir du langage des théologiens, ne sont que des œuvres mortes.

En 1705 le duc de Berwick fut envoyé commander en Languedoc : cette même année il fit le siège de Nice, et la prit.

En 1706 il fut fait maréchal de France, et fut envoyé en Espagne pour commander l’armée contre le Portugal. Le roi d’Espagne avoit levé le siège de Barcelone, et avoit été obligé de repasser par la France et de rentrer en Espagne par la Navarre.

J’ai dit qu’avant de quitter l’Espagne, la première fois qu’il y servit, il l’avoit sauvée ; il la sauva encore cette fois-ci. Je passe rapidement sur les choses que l’histoire est chargée de raconter ; je dirai seulement que tout étoit perdu au commencement de la campagne, et que tout étoit sauvé à la fin. On peut voir, dans les lettres de madame de Maintenon à la princesse des Ursins, ce que l’on pensoit pour lors dans les deux cours. On formoit des souhaits, et on n’avoit pas même d’espérances. M. le maréchal de Berwick vouloit que la reine se retirât à son armée : des con-

  1. var. Et le roi d’Espagne avoit écrit lui-même au roi son bisaïeul.