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PENSÉES DIVERSES.

qu’on sait à peu près au juste ce qu’on tire de ses fils, la fortune et le mérite qu’ils ont ; mais on espère et l’on se flatte sur ses petits-fils.

Je n’aime pas les petits honneurs. On ne savait pas auparavant ce que vous méritiez ; mais ils vous fixent et décident au juste ce qui est fait pour vous.

Quand, dans un royaume, il y a plus d’avantage à faire sa cour qu’à faire son devoir, tout est perdu.

La raison pour laquelle les sots réussissent toujours dans leurs entreprises, c’est que, ne sachant pas et ne voyant pas quand ils sont impétueux, ils ne s’arrêtent jamais.

Remarquez bien que la plupart des choses qui nous font plaisir sont déraisonnables.

Les vieillards qui ont étudié dans leur jeunesse n’ont besoin que de se ressouvenir, et non d’apprendre.

On pourrait, par des changements imperceptibles dans la jurisprudence, retrancher bien des procès.

Le mérite console de tout.

J’ai ouï dire au cardinal Imperiali : « Il n’y a point d’homme que la fortune ne vienne visiter une fois dans sa vie ; mais lorsqu’elle ne le trouve pas prêt à la recevoir, elle entre par la porte, et sort par la fenêtre. »

Les disproportions qu’il y a entre les hommes sont bien minces pour être si vains : les uns ont la goutte, d’autres la pierre ; les uns meurent, d’autres vont mourir ; ils ont une même âme pendant l’éternité, et elles ne sont différentes que pendant un quart d’heure, et c’est pendant qu’elles sont jointes à un corps.

Le style enflé et emphatique est si bien le plus aisé, que, si vous voyez une nation sortir de la barbarie, vous verrez que son style donnera d’abord dans le sublime, et ensuite descendra au naïf. La difficulté du naïf est que le