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AVIS DE L’ÉDITEUR DE 1767.

traits de lumière, cette légèreté et ces saillies qui font le caractère des ouvrages de ce grand homme. Quelques-unes de ces lettres étant écrites d’un caractère peu lisible, d’autres étant mal conservées, il se sera peut-être glissé quelques inexactitudes dans la copie que j’en ai fait faire, mais je puis assurer que cela n’est pas arrivé souvent et n’a occasionné aucune altération essentielle. D’ailleurs, dans des écrits de cette espèce, on ne doit point être choqué de certaines négligences, qui sont inévitables, comme on n’est point choqué de voir dans son négligé une belle femme qu’on n’a vue que dans sa parure. Il n’est peut-être pas indifférent à l’histoire de l’esprit humain de connoître les différentes nuances que présentent même les génies, et il est utile de voir ceux-ci, ainsi que les héros, dans leur façon et manière d’être familière.

Je voudrois bien que cet exemple encourageât ceux qui, en France, auront des lettres de cet illustre écrivain à les faire aussi connoître, persuadé que son âme et son esprit s’y trouvent également, car on le voit dans ses lettres tel qu’il étoit dans la conversation. Si un amas de petites anecdotes, d’entretiens particuliers, de bons mots, de quolibets, de sentiments et de saillies d’un des plus beaux esprits du siècle[1], dont un des quarante de l’Académie françoise[2] a entretenu très-diffusément et pendant longtemps le public, dans les Mercures de France, en a rendu la lecture intéressante, combien à plus forte raison les monuments d’amitié de la tête, à bien des égards, la mieux pensante de notre siècle, de l’homme qui, selon l’expression d’un écrivain connu[3] a fait le Code du genre humain, et qui est regardé comme le législateur de toutes les nations, doivent-ils être recherchés et conservés, quand ce ne seroit que comme des Mémoires littéraires.

Je me flatte au reste qu’on ne désapprouvera pas les notes que j’ai faites sur quelques endroits de ces lettres[4]. Elles ont paru utiles pour l’intelligence du texte, et nécessaires pour donner une connoissance des personnes et des faits dont il est question, surtout en Italie, où cette collection a été désirée.

  1. Fontenelle.
  2. L’abbé Trublet.
  3. Voltaire.
  4. Ces notes sont désignées dans notre édition par un G.