Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t7.djvu/255

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
237
LETTRES FAMILIÈRES.

dent. » Ce n’est pas avec les Papes que ces paroles— ci pourroient vous brouiller, mais avec le Clergé de France. Je passe peut-être le but, et mon observation est trop raffinée. Si vous disiez : u par l’autorité de l’Église », tout court, vous ne vous brouilleriez sûrement avec personne ; au lieu qu’en disant « l’Église d’Occident », vous semblez donner au Pape l’infaillibilité, qu’on lui conteste dans ce pays-ci ; car il me semble qu’il n’y a pas de milieu entre les deux sentiments qui donnent l’autorité infaillible, l’un à l’Église universelle, l’autre au Pape. Or, lorsque vous mettez cette autorité dans l’Eglise d’Occident, vous excluez celle d’Orient, et par conséquent l’Universalité. Vous sentez bien que l’Église d’Occident ne peut s’attribuer d’autorité sur celle d’Orient qu’à raison du Pape, et que c’est même là ce que vous voulez dire. Voilà de la subtilité théologique. Mais admirez mon impartialité ; car, moi qui ai l’honneur de vous parler, je crois en mon particulier à l’infaillibilité du Pape. Cependant, comme je sais que ce n’est pas une doctrine obligée, et qu’en France les catholiques pensent la plupart autrement, je me crois obligé par une certaine équité de vous en avertir, pour répondre à la confiance dont vous voulez m’honorer.

Je trouve extrêmement sage la suppression des excommunications ; vous allez à votre but indépendamment de tout cela.

Pour ce qui est de vos feuilles, si elles doivent bientôt revenir correctes, je les attendrai ; sinon je pourrai toujours relire, pour me bien remplir du système et de l’esprit de l’ouvrage, parce qu’en effet je ne saurois faire à mon gré un pareil extrait sans savoir presque par cœur un ouvrage si quintessencié, si exquis. Je vous avouerai que, dans les sujets qui en valent la peine et qui m’intéressent, je ne