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LETTRES FAMILIÈRES.


LETTRE XX.


A M. DE MONCRIF[1], DE L’ACADÉMIE FRANÇOISE.


J’oubliai d’avoir l’honneur de vous dire, monsieur, que si le sieur Prault[2] dans l’édition de ce petit roman[3], alloit mettre quelque chose qui, directement ou indirectement, pût faire penser que j’en suis l’auteur, il me désobligeroit beaucoup. Je suis, à l’égard des ouvrages qu’on m’attribue, comme la Fontaine-Martel[4] étoit pour les ridicules. On me les donne, mais je ne les prends point. Mille excuses, monsieur, et faites-moi l’honneur de me croire, monsieur, plus que je ne saurais vous dire, votre très-humble et très-obéissant serviteur.

Ce 20 avril 1738.


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  1. François-Augustin Paradis de Moncrif, ne à Paris vers 1688, mort en 1770. C’était un de ces hommes du monde comme il y en a dans tous les siècles, qui se disent littérateurs, et qui ont le talent de se faire accepter comme tels par les académiciens de leur temps. Il avait eu l’idée singulière d’accoler un roman de sa façon, les Ames rivales, au Temple de Gnide. V. notre tome II, préface, page 7.
  2. Le libraire ordinaire de Montesquieu.
  3. Le Temple de Gnide.
  4. Antoinette-Madeleine Des Bordeaux, comtesse de Fontaine-Martel, née vers 1662, mourut à Paris entre les bras de Voltaire, le 22 janvier 1733. (Ravenel.)