Page:Montesquieu - Esprit des Lois - Tome 2.djvu/408

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Tel était l’arrière-vasselage, lorsque les fiefs étaient amovibles ; tel il était encore, pendant que les fiefs furent à vie. Cela changea lorsque les fiefs passèrent aux héritiers, et que les arrière-fiefs y passèrent de même. Ce qui relevait du roi immédiatement, n’en releva plus que médiatement ; et la puissance royale se trouva, pour ainsi dire, reculée d’un degré, quelquefois de deux, et souvent davantage.

On voit, dans les Livres des Fiefs, que quoique les vassaux du roi pussent donner en fief, c’est-à-dire en arrière-fief du roi, cependant ces arrière-vassaux ou petits vavasseurs ne pouvaient pas de même donner en fief ; de sorte que ce qu’ils avaient donné, ils pouvaient toujours le reprendre. D’ailleurs une telle concession ne passait point aux enfants comme les fiefs, parce qu’elle n’était point censée faite selon la loi des fiefs.

Si l’on compare l’état où était l’arrière-vasselage du temps que les deux sénateurs de Milan écrivaient ces Livres, avec celui où il était du temps du roi Pépin, on trouvera que les arrière-fiefs conservèrent plus longtemps leur nature primitive que les fiefs.

Mais lorsque ces sénateurs écrivirent, on avait mis des exceptions si générales à cette règle, qu’elles l’avaient presque anéantie. Car, si celui qui avait reçu un fief du petit vavasseur l’avait suivi à Rome dans une expédition, il acquérait tous les droits de vassal ; de même, s’il avait donné de l’argent au petit vavasseur pour obtenir le fief, celui-ci ne pouvait le lui ôter, ni l’empêcher de le transmettre à son fils, jusqu’à ce qu’il lui eût rendu son argent. Enfin, cette règle n’était plus suivie dans le sénat de Milan.