Page:Montesquieu - Pensées et Fragments inédits, t2, 1901.djvu/426

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lors, une seule nation, qui étoit la vénitienne, faisoit ce commerce. Ce qui faisoit qu’elle vendoit au prix qu’elle vouloit, qu’elle n’achetoit pas de la première main, qu’elle souffroit mille avanies des Turcs, beau5 coup plus barbares et beaucoup moins timides qu’aujourd’hui.

Ce ne peut être la commodité et facilité du transport qui a ruiné le commerce des Indes par l’Égypte, et la difficulté de l’isthme de Suez. Ce trajet est si

1o court qu’il n’a pas pu faire une si prodigieuse différence ; d’autant plus qu’on transporte encore par Bassorah des marchandises des Indes à Alep, ce qui fait une distance prodigieuse par terre. Les Iles des Épiceries, les tributs que les Portugais exigeoient des

15 princes de l’Inde, les conditions arbitraires qu’ils mettoient dans le commerce avec les Indiens, l’exclusion presque universelle qu’ils leur donnoient de la navigation, les droits qu’ils levoient lorsqu’ils naviguoient, les immenses profits du commerce du

3o Japon, les épiceries qui leur tenaient lieu d’argent pour les achats qu’ils faisoient aux Indes, qui leur coûtoient peu, qu’ils leur vendoient au prix qu’ils vouloient, firent absolument tomber le commerce des Indes par l’Égypte. Et, comme les Hollandois ont

25 succédé aux maximes et à la puissance des Portugais, c’est encore ce qui leur donne et leur donnera la supériorité dans le commerce sur les autres nations, soit qu’elles fassent ce commerce par la voye de l’Égypte ou celle du cap de Bonne-Espérance.

3o Comme les Hollandois sont obligés d’entretenir grand nombre de forteresses, beaucoup de forces de