Page:Montesquieu - Pensées et Fragments inédits, t2, 1901.djvu/434

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lui-même. Il fait sortir les piastres, les envoye à ses commis, qui les vendent aux marchands, moyennant de certaines lettres de change payables à des termes courts, et, quand il est payé, il fait

5 remettre son argent à Madrid ; ce qu’il peut faire

ou en espèces, ou en change, ou en marchandises.

En espèces, cela est difficile. Tant mieux, s’il le

faisoit en marchandises. Mais il lui convient mieux

de le faire par change.

1o Voici ce qu’il auroit fallu faire pour interrompre son opération. Supposant qu’il eût à faire remettre à Madrid 10, 12, 15 millions monnoye de France, on pouvoit lui ôter son profit en faisant baisser le change ; ce qui pouvoit se faire aisément par le Roi,

15 en perdant 100 ou 200,000 écus ; ce qui est une opération facile. Quand le ministre d’Espagne auroit vu que toute son opération lui auroit produit peu de profit (car il ne laisse pas d’y avoir des dépenses à faire en commis, transport de piastres, etc.), le jour

2o qu’il auroit reçu son mémoire, il n’y avoit qu’à lui faire présenter une requête par nos marchands, et lui demander l’extraction, moyennant 2 pour 100 de profit pour le Roi. Il est certain qu’il auroit accepté (sic) pe bénéfice clair, net et sans peine, à une opé

25 ration moins lucrative, plus coûteuse et plus pénible ; moyennant quoi il abandonnoit son projet.

On dit qu’il en a un autre ; c’est de rendre l’Espagne entièrement maîtresse du commerce de Cadix et d’envoyer elle-même, sans l’intervention des étran

3o gers, les marchandises dans les Indes, tant celles qu’il tirera des manufactures d’Espagne, faites ou à