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de l’esprit des Lois,

peut pas bien faire, il faut qu’il le fasse par ses ministres.

Ses ministres ne sont point à lui, s’il ne les nomme : c’est donc une maxime fondamentale de ce gouvernement, que le peuple nomme ses ministres, c’est-à-dire ses magistrats.

Il a besoin, comme les monarques, & même plus qu’eux, d’être conduit par un conseil ou sénat. Mais pour qu’il y ait confiance, il faut qu’il en élise les membres ; soit qu’il les choisisse lui-même, comme à Athenes ; ou par quelque magistrat qu’il a établit pour les élire, comme cela se pratiquoit à Rome dans quelques occasions.

Le peuple est admirable pour choisir ceux à qui il doit confier quelque partie de son autorité. Il n’a à se déterminer que par des choses qu’il ne peut ignorer, & des faits qui tombent sous les sens. Il sait très-bien qu’un homme a été souvent à la guerre, qu’il y a eu tels ou tels succès : il est donc très-capable d’élire un général. Il sait qu’un juge est assidu, que beaucoup de gens se retirent de son tribunal contens de lui, qu’on ne l’a pas convaincu de corruption ; en voilà assez pour qu’il élise un