Page:Montesquieu Esprit des Lois 1777 Garnier 1.djvu/336

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
162
De l’esprit des Lois,

le juge de toutes les affaires, pour que les accusateurs & les accusés, dans les murs d’un palais, ne fussent pas exposés à l’unique pouvoir de quelques affranchis[1].

« Sous le regne d’Arcadius, dit Zozime[2], la nation des calomniateurs se répandit, entoura la cour, & l’infecta. Lorsqu’un homme étoit mort, on supposoit qu’il n’avoit point laissé d’enfans[3] ; on donnoit ses biens par un rescrit. Car comme le prince étoit étrangement stupide, & l’impératrice entreprenante à l’excès, elle servoit l’insatiable avarice de ses domestiques & de ses confidentes ; de sorte que, pour les gens modérés, il n’y avoit rien de plus désirable que la mort.

« Il y avoit autrefois, dit Procope[4], fort peu de gens à la cour : mais sous Justinien, comme les juges n’avoient plus la liberté de rendre justice, leurs tribunaux étoient déserts, tandis que le palais du prince retentissoit des clameurs des parties qui y sollicitoient leurs affaires. » Tout le monde sait

  1. Ibid. liv. XIII.
  2. Hist. liv. V.
  3. Même désordre sous Théodose le jeune.
  4. Histoire secrette.