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Liv. VII. Chap. XIII.

lois pour punir ces crimes, que parce qu’on ne punissoit plus les violations, qui n’étoient point ces crimes.

L’affreux débordement des mœurs obligeoit bien les empereurs de faire des lois pour arrêter à un certain point l’impudicité : mais leur intention ne fut pas de corriger les mœurs en général. Des faits positifs rapportés par les historiens prouvent plus cela que toutes ces lois ne sauroient prouver le contraire. On peut voir dans Dion la conduite d’Auguste à cet égard ; & comment il éluda, & dans sa préture & dans sa censure, les demandes qui lui furent faites[1].

On trouve bien dans les historiens des jugemens rigides, rendus sous Auguste & sous Tibere, contre l’impudicité de quelques dames Romaines : mais en

  1. Comme on lui eut amené un jeune homme qui avoit épousé une femme, avec laquelle il avoit eu auparavant un mauvais commerce, il hésita longtemps, n’osant ni approuver, ni punir ces choses. Enfin reprenant ses esprits : « les séditions ont été cause de grands maux, dit-il, oublions-les ». Dion, liv. LIV. Les sénateurs lui ayant demandé des réglemens sur les mœurs des femmes, il éluda cette demande, en leur disant qu’ils corrigeassent leurs femmes, comme il corrigeoit la sienne : sur quoi ils le prierent de leur dire comment il en usoit avec sa femme : question, ce me semble, fort indiscrete.