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Liv. X. Chap. XIV.

assembloit des armées innombrables dans un autre univers.

Le passage du Granique fit qu’Alexandre se rendit maître des colonies Grecques ; la bataille d’Issus lui donna Tyr & l’Egypte ; la bataille d’Arbelles lui donna toute la terre.

Après la bataille d’Issus, il laisse fuir Darius, & ne s’occupe qu’à affermir & à régler ses conquêtes : après la bataille d’Arbelles, il le suit de si près[1], qu’il ne lui laisse aucune retraite dans son empire. Darius n’entre dans ses villes & dans ses provinces, que pour en sortir : les marches d’Alexandre sont si rapides, que vous croyez voir l’empire de l’univers plutôt le prix de la course, comme dans les jeux de la Grece, que le prix de la victoire.

C’est ainsi qu’il fit ses conquêtes : voyons comment il les conserva.

Il résista à ceux qui vouloient qu’il traitât[2] les Grecs comme maîtres, & les Perses comme esclaves : il ne songea qu’à unir les deux nations, & à faire perdre les distinctions du peuple

  1. Voyez Arrien, de expedit. Alexandri, lib. III.
  2. C’étoit le conseil d’Aristote. Plutarque, Œuvres morales : de la fortune d’Alexandre.