Page:Montesquieu Esprit des Lois 1777 Garnier 2.djvu/173

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
141
Liv. XVIII. Chap. II.


CHAPITRE II.

Continuation du même sujet.


Ces pays fertiles sont des plaines, où l’on ne peut rien disputer au plus fort : on se soumet donc à lui ; & quand on lui est soumis, l’esprit de liberté n’y sauroit revenir ; les biens de la campagne sont un gage de la fidélité. Mais dans les pays de montagnes, on peut conserver ce que l’on a, & l’on a peu à conserver. La liberté, c’est-à-dire le gouvernement dont on jouit, est le seul bien qui mérite qu’on le défende. Elle regne donc plus dans les pays montagneux & difficiles, que dans ceux que la nature sembloit avoir plus favorisés.

Les montagnards conservent un gouvernement plus modéré, parce qu’ils ne sont pas si fort exposés à la conquête. Ils se défendent aisément, ils sont attaqués difficilement ; les munitions de guerre & de bouche sont assemblées & portées contr’eux avec beaucoup de dépense, le pays n’en fournit point. Il est donc plus difficile de leur faire la guerre, plus dangereux de l’entreprendre ; &