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Liv. XX. Chap. I.

mœurs sont moins féroces qu’elles ne l’étoient autrefois. Le commerce a fait que la connoissance des mœurs de toutes les nations a pénétré par-tout : on les a comparées entr’elles, & il en a résulté de grands biens.

On peut dire que les lois du commerce perfectionnent les mœurs ; par la même raison que ces mêmes lois perdent les mœurs. Le commerce corrompt les mœurs pures[1] ; c’étoit le sujet des plaintes de Platon : il polit & adoucit les mœurs barbares, comme nous le voyons tous les jours.




CHAPITRE II.

De l’esprit du Commerce.


L’effet naturel du commerce est de porter à la paix. Deux nations qui négocient ensemble, se rendent réciproquement dépendantes : si l’une a intérêt d’acheter, l’autre a intérêt de

  1. César dit des Gaulois, que le voisinage & le commerce de Marseille les avoit gâtés de façon qu’eux, qui autrefois avoient toujours vaincu les Germains, leur étoient devenus inférieurs. Guerre des Gaules, liv. VI.