Page:Montesquieu Esprit des Lois 1777 Garnier 2.djvu/364

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
336
De l’esprit des Lois,

ils achetoient peu, & vendoient beaucoup, ils attiroient[1] à eux l’or & l’argent de leurs voisins. Auguste[2] connut leur opulence, & il résolut de les avoir pour amis, ou pour ennemis. Il fit passer Elius Gallus d’Égypte en Arabie. Celui-ci trouva des peuples oisifs, tranquilles & peu aguerris. Il donna des batailles, fit des sieges, & ne perdit que sept soldats : mais la perfidie de ses guides, les marches, le climat, la faim, la soif, les maladies, des mesures mal prises, lui firent perdre son armée.

Il fallut donc se contenter de négocier avec les Arabes comme les autres peuples avoient fait, c’est-à-dire, de leur porter de l’or & de l’argent pour leurs marchandises. On commerce encore avec eux de la même maniere ; la caravane d’Alep & le vaisseau royal de Suez y portent des sommes immenses[3].

La nature avoit destiné les Arabes au commerce ; elle ne les avoit pas destinés

  1. Pline, liv. VII. chapitre xxviii ; & Strabon, liv. XVI.
  2. Ibid.
  3. Les caravanes d’Alep & de Suez y portent deux millions de notre monnoie, & il en passe autant en fraude ; le vaisseau royal de Suez y porte aussi deux millions.