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De l’esprit des Lois,


Dans ces pays, où la chaleur excessive énerve & accable, le repos est si délicieux, & le mouvement si pénible, que ce systême de métaphysique paroît naturel ; &[1] Foë, législateur des Indes, a suivi ce qu’il sentoit, lorsqu’il a mis les hommes dans un état extrêmement passif : mais la doctrine, née de la paresse du climat, la favorisant à son tour, a causé mille maux.

Les législateurs de la Chine furent plus sensés, lorsque considérant les hommes, non pas dans l’état paisible où ils seront quelque jour, mais dans l’action propre à leur faire remplir les devoirs de la vie, ils firent leur religion, leur philosophie & leurs lois toutes pratiques. Plus les causes physiques portent les hommes au repos, plus les causes morales les en doivent éloigner.

  1. Foë veut réduire le cœur au pur vide. « Nous avons des yeux & des oreilles ; mais la perfection est de ne voir ni entendre : une bouche, des mains etc. la perfection est que ces membres soient dans l’inaction. » Ceci est tiré du dialogue d’un Philosophe Chinois, rapporté par le P. du Halde, tom. III.