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De l’esprit des Lois,

lorsque cette corruption devient générale, la censure n’a plus de force[1].

Les discordes civiles, les triumvirats, les proscriptions, affoiblirent plus Rome qu’aucune guerre qu’elle eût encore faite : il restoit peu de citoyens[2], & la plupart n’étoient pas mariés. Pour remédier à ce dernier mal, César & Auguste rétablirent la censure, & voulurent[3] même être censeurs. Ils firent divers réglemens : César[4] donna des récompenses à ceux qui avoient beaucoup d’enfans ; il défendit[5] aux femmes qui avoient moins de quarante-cinq ans, & qui n’avoient ni maris ni enfans, de porter des pierreries, & de se servir de litieres : méthode excellente d’attaquer le célibat par la vanité. Les lois d’Auguste[6] furent plus pressantes : il imposa[7] des peines nouvelles à ceux

  1. Voyez ce que j’ai dit au livre V. ch. xix.
  2. César, après la guerre civile, ayant fait faire le cens, il ne s’y trouva que cent cinquante mille chefs de famille. Epitome de Florus sur Tite-Live, douzieme décade.
  3. Voyez Dion, liv. XLIII. & Xiphil. In August.
  4. Dion, liv. XLIII ; Suétone, vie de César, ch. xx. Appien, liv. II. de la guerre civile.
  5. Eusebe dans sa chronique.
  6. Dion, liv. LIV.
  7. L’an 736 de Rome.