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De l’esprit des Lois,

roi, & encore plus les Romains, chercherent à le devenir ; & qu’afin qu’ils ne fussent pas privés de leurs domaines, on imagina l’usage de donner son alleu au roi, de le recevoir de lui en fief, & de lui désigner ses héritiers. Cet usage continua toujours ; & il eut sur-tout lieu dans les désordres de la seconde race, où tout le monde avoit besoin d’un protecteur, & vouloit faire corps[1] avec d’autres seigneurs ; & entrer, pour ainsi dire, dans la monarchie féodale, parce qu’on n’avoit plus la monarchie politique.

Ceci continua dans la troisieme race, comme on le voit par plusieurs[2] chartres ; soit qu’on donnât son alleu, & qu’on le reprît par le même acte ; soit qu’on le déclarât alleu, & qu’on le reconnût en fief. On appelloit ces fiefs, fiefs de reprise.

Cela ne signifie par que ceux qui avoient des fiefs les gouvernassent en bons peres de familles ; &, quoique les hommes libres cherchassent beaucoup à

  1. Non infirmis reliquit hæredibus, dit Lambert d’Ardres, dans du Cange, au mot alodis.
  2. Voyez celles que du Cange cite au mot alodis ; & celles que rapporte Galland, traité du franc alleu, page 14 & suiv.