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De l’esprit des Lois,

périr, faute de ministres[1], de temples & d’instructions.

Cela fit que Charlemagne établit[2] les dîmes, nouveau genre de bien, qui eut cet avantage pour le clergé, qu’étant singuliérement donné à l’église, il fut plus aisé dans la suite d’en reconnoître les usurpations.

On a voulu donner à cet établissement des dates bien plus reculées : mais les autorités que l’on cite, me semblent être des témoins contre ceux qui les alleguent. La constitution[3] de Clotaire dit seulement qu’on ne leveroit point de certaines dîmes[4] sur les biens

  1. Dans les guerres civiles qui s’éleverent du temps de Charles Martel, les biens de l’église de Rheims furent donnés aux laïques. On laissa le clergé subsister comme il pourroit, est-il dit dans la vie de S. Remy Surius, tome I, page 279.
  2. Loi des Lombards, liv. III, tit. 3, §. 1 & 2.
  3. C’est celle dont j’ai tant parlé au chapitre iv ci-dessus, que l’on trouve dans l’édition des capitulaires de Baluze, tome I, art. 11, page 9.
  4. Agraria & pascuaria, vel decimas porcorum, ecclesiæ concedimus, ità ut actor aut decimator in rebus ecclesiæ nullus accedat. Le capitulaire de Charlemagne, de l’an 800, édition de Baluze, p. 336, explique très-bien ce que c’étoit que cette sorte de dîme dont Clotaire exempte l’église ; c’étoit le dixieme des cochons, que l’on mettoit dans les forêts du roi pour engraisser : & Charlemagne veut que ses juges le payent comme les autres, afin de donner l’exemple. On voit que c’étoit un droit seigneurial ou économique.