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Défense


Voici, mot pour mot, une objection bien extraordinaire.

La polygamie[1] d’une femme qui a plusieurs maris est un désordre monstrueux, qui n’a été permis en aucun cas, & que l’auteur ne distingue en aucune sorte de la polygamie d’un homme qui a plusieurs femmes. Ce langage, dans un sectateur de la religion naturelle, n’a pas besoin de commentaire.

Je supplie de faire attention à la liaison des idées du critique : selon lui, il suit que, de ce que l’auteur est un sectateur de la religion naturelle, il n’a point parlé de ce dont il n’avoit que faire de parler : ou bien il suit, selon lui, que l’auteur n’a point parlé de ce dont il n’avoit que faire de parler, parce qu’il est sectateur de la religion naturelle. Ces deux raisonnemens sont de même espece, & les conséquences se trouvent également dans les prémices. La maniere ordinaire est de critiquer sur ce que l’on écrit ; ici le critique s’évapore sur ce que l’on n’écrit pas.

Je dis tout ceci, en supposant, avec le critique, que l’auteur n’eût point distingué la polygamie d’une femme qui a

  1. Page 164 de la feuille du 9 Octobre 1749.