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« Tout proclame l’existence de Dieu ; c’est indubitable… Dès que j’ai eu le pouvoir, je me suis empressé de rétablir la religion. Je m’en servais comme de base et de racine ; elle était à mes yeux l’appui de la bonne morale, des vrais principes, des bonnes mœurs. L’inquiétude de l’homme est telle qu’il lui faut ce vague et ce merveilleux qu’elle lui présente.

Quelqu’un lui ayant dit qu’il pourrait se faire qu’il finît par être dévot, l’Empereur a répondu qu’il craignait que non ; mais que, chez lui, l’incrédulité ne venait ni de travers, ni de libertinage d’esprit. « L’homme, ajoutait-il, ne doit jurer de rien sur tout ce qui concerne ses derniers instants. » — Comme on citait quelqu’un qui s’était vanté, en quelque sorte, de n’avoir pas fait sa première communion : « C’est fort mal à lui, a repris l’Empereur, il a manqué là à son éducation ! » Et continuant : « Dire d’où je viens, ce que je suis, où je vais, est au-dessus de mes idées, et pourtant tout cela est ; je suis la montre qui existe et qui ne se connaît pas. Le sentiment religieux est si consolant que c’est un bienfait du ciel que de le posséder. De quelle ressource ne nous serait-il pas ici ? Quelle puissance pourraient avoir sur moi les hommes et les choses si, prenant en vue de Dieu mes revers et mes peines, j’en attendais le bonheur futur pour récompense ? Quelle serait ma jouissance si le charme d’un avenir futur se présentait à moi pour couronner la fin de ma vie ! »

L’Empereur a terminé cette conversation en en-